Sine Macula

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Journal des macules
50 × 65 cm
Papier journal

Sine Macula est le journal de l'atelier ; il est en fait constitué de macules de gravures et de sérigraphies, c'est à dire des rebuts. Le journal n'est là que pour dire l'encre comme dépôt, comme couche, mais aussi manque, tout cela matérialisé sur un support, le papier, qui demeure le récep­tacle tangible de ces expériences plastiques, le champ où s'articule la rencontre entre les « écrans ».

Parler des différences entre écran numérique et écran de sérigraphie c'est faire apparaître des relations complexes entre le propre et le sale, le sec et l'humide. Le propre et le sec sont devenus des conditions nécessaires au fonctionnement des nouvelles technologies, alors que les technologies rétrogradées au rang d'antiquités, comme la sérigraphie et beaucoup d'autres pratiques, se développaient en milieu humide, produisant leur propre poussière, tâches et autres imperfections qui désormais sèment la terreur dans le monde immaculé de la création digitale. Les pratiques artistiques contemporaines consistent bien souvent en l'évacuation des techniques humides.

Toute la technologie semble aller vers une étanchéité qui n'est pas loin, parfois, de confiner à l'aseptisation des travaux. Au repentir a succédé l'annulation, bien connue dans la combinaison des touches « Pomme + Z », ou « Ctrl + Z ». L'humidité et les caractéristiques qui lui sont attachées telles que l'instabilité, le risque de bavure, éventuellement de moisissures etc. , se retrouvant être artificiellement réintroduites par des effets qui l'imitent en surface. La mise en relation des différents écrans, et donc des procédés de production d'images, nous permet de faire valoir de façon contrastées ces notions de liquidité et de solid­ité. La liquidité suppose un contrôle permanent de la trajectoire (jusqu'à la mettre plastiquement en scène dans le dripping). Les techniques humides, de par l'aléa, l'inconfort et l'insécurité qu'elles imposent à l'opérateur, ont aussi pour force cette imprévisibilité qui contraste avec la sécheresse présente dans de nombreux travaux produits sur ou pour des écrans. Cette dimension est d'autant plus importante que l'archivage, et donc la mémoire de l'humanité, a tendance à être systématiquement numérisée comme si l'on pouvait ainsi juguler les outrages du temps. Les cristaux liquides reprennent le dessus sur une technologie qui finalement se joue de l'humidité.